Impacts du coronavirus sur le marché immobilier
Retranscription de l’interview
De nombreuses mesures ont été prises pour ralentir la propagation du nouveau coronavirus (Covid-19), tant par la confédération que par les cantons. Elles ont des impacts significatifs sur l’économie à très large échelle. Quelles sont les répercutions sur le marché immobilier?
En préambule, je tiens à rappeler que tout peut aller extrêmement vite! Il y a quelques semaines, si on nous avais dit que quasiment tout serait à l’arrêt en Suisse, et à plus large échelle, dans le monde entiers, peu de gens l’auraient cru. Il suffit de regarder quotidiennement les nouvelles pour se rendre compte de la vitesse à laquelle cette épidémie se repend. Aujourd’hui, nous sommes le 31 mars 2020, et peut-être que d’ici mi-avril, la situation sera bien différente.
Deuxièmement, je précise qu’une grande partie de ces projections sont basées sur la dernière étude réalisée par la société Wüest & Partner. Pour ceux qui ne la connaisse pas, il s’agit d’une entité indépendante, active depuis 1985. Ils sont experts dans l’analyse statistique immobilière à très large échelle.
Bref… Si l’on fait le point actuellement, la crise sanitaire engendrée par le nouveau coronavirus entraînera très probablement une récession au niveau mondial ainsi qu’en Suisse. De ce fait, tous les segments du marché de l’immobilier seront touchés, mais à différentes échelles.
Le marché de l’immobilier regroupe beaucoup de secteurs. Commençons peut-être par le marché des logements locatifs? Quels seront les impacts à court terme?
La demande concernant les logements locatifs pourrait sensiblement diminuer dans le courant de cette année, mais pas forcément de manière drastique. Ce qu’il faut savoir sur ce marché, c’est que le nombre de logements vacants avait sensiblement augmenté dans beaucoup de régions, et cela, même avant la crise sanitaire liée au nouveau coronavirus. Parmi les nombreuses conséquences à cette pandémie, on peut notamment s’attendre à quelques suppressions d’emplois, ainsi qu’à un taux d’immigration réduit. Cela favoriserait donc légèrement une hausse du taux de vacances des appartements. Cependant, cette hausse serait en partie compensée par la baisse du nombre d’autorisation de construire constatée en 2019. Des baisses de loyers pourraient donc être constatés à court terme, mais de manière très modérées.
En revanche, les logements à loyer élevés, ainsi que les appartements avec des services devraient subir temporairement la plus forte pression.
Qu’en est-il du marché de la vente immobilière?
A court terme, la demande d’acquisition immobilière a chuté de manière drastique. Nous avons pu le vérifier nous même à l’agence, où le nombre de demande de dossier a nettement diminué. Par ailleurs, la majorité de mes confrères sont au chômage technique, du moins ceux qui travaillent uniquement dans la vente. Il nous est recommandé d’éviter tout contact avec la clientèle.
En dehors de ça, il faut s’attendre à ce que certains acquéreurs potentiels subissent des nouvelles restrictions pour l’acquisition, en raison de la situation conjoncturelle. En effet, il est possible que les catégories à revenus élevés, qui représente quand même une partie importante des acquéreurs immobiliers, enregistrent une baisse de leurs salaires et une réduction de leurs fonds propres. Si cela s’avérait, une telle évolution atténuerait la demande de logements en propriété. Cela affecterait donc à la baisse certains prix, mais de manière temporaire là aussi.
Encore un autre point qui ressort des statistiques. L’expérience montre que le prix des appartements en PPE baisse plus fortement que ceux des maisons individuelles en cas de reculs conjoncturels. On pourrait donc également observer cela lors de cette pandémie. Cela dit, d’après les informations actuelles, aucun effondrement des prix n’est toutefois à craindre.
Qu’en est-il du marché des crédits hypothécaires? Est-ce qu’on peut s’attendre à des défauts de paiements de la part de certains propriétaires?
Non, cela ne devrait pas être le cas. Pour commencer, il faut se rappeler que la majorité des propriétaires bloquent leurs taux sur des échéances assez longues, entre 5 à 10 ans. Par ailleurs, les conditions d’accès à un crédit hypothécaire sont assez restrictives, notamment du fait de la tenue des charges théoriques. Celle-ci est toujours basée sur des taux d’intérêts théoriques à 5%, alors qu’en réalité, on tourne plus aux alentours de 1%. Concrètement, même si le ménage subit une baisse de ses revenus, par exemple si le propriétaire est au chômage technique, il devrait en principe toujours lui rester suffisamment pour payer les échéances de sa banque.
En fait, il ne faudrait s’attendre à des défauts de paiements que si la crise perdurerait pendant plusieurs années. Pour le moment, ce n’est dans aucune supposition.
Concernant l’offre hypothécaire actuelle, pour ceux qui voudraient quand-même acheter de l’immobilier dans les semaines ou mois à venir. Est-ce que les conditions hypothécaires ont changées?
Pour le moment, la crise du nouveau coronavirus n’a pas changé de manière drastique les taux hypothécaires. En tout cas, pas pour ce qui concerne les longues échéances. Une légère augmentation a été constatée pour les taux d’intérêts à courts et moyens termes. Cela dit, d’une manière générale, il est très peu probable que les taux remontent encore. En effet, en cas de crise, c’est souvent un abaissement des taux d’intérêts qui est privilégié pour relancer l’économie, avec des prêts d’argents massifs. Cela se répercute donc sur les taux hypothécaires qui devraient rester bas.
En revanche, c’est le processus de validation du crédit qui a quelque peu changé du côté des établissements de financements. La raison principale est que ceux-ci pratiquent quasiment tous le télétravail et cela a pour effet de ralentir tout le processus. Il faudra donc être un peu plus patient qu’en temps normal.
Il y a encore une question qui revient maintenant depuis quelques jours. Cela concerne les loyers, que certaines personnes auraient de la peine à payer. Que dit la loi?
Avant toute chose, je tiens à rappeler que derrière un loyer, avant que le propriétaire récupère l’argent, vous avez d’innombrables bénéficiaires. Cela va du concierge, aux différents maîtres d’œuvres, tous les frais d’entretiens, les frais de chauffage, d’électricité, d’eau, les taxes et impôts divers, sans oublier les intérêts hypothécaires. Il faut bien comprendre que si le loyer n’est pas payé, le problème se reporte à une plus large échelle… Sans compter que vous avez certains propriétaires privés, qui ont investis tout leur capital dans un bien de rendement. Il s’agit parfois de leur principale source de revenu. Donc il faut aussi avoir une vision globale et pas seulement locale. Cette crise touche tout le monde. Bref, parenthèse fermée.
Ce que je peux vous dire vis-à-vis de la loi, c’est que le conseil fédéral a étendu vendredi dernier de 30 à 90 jours le délai de paiement en cas de retard dû au nouveau coronavirus. Il a également allongé certains délais de congé.
Enfin, pour tous les entrepreneurs ou les patrons qui payent des locaux commerciaux dans le vide, car ils ne peuvent plus travailler suite aux décisions sanitaires, c’est une autre histoire. Des discussions sont en cours, car chacun défend son point de vue. Je pense que nous en saurons plus dans les jours, ou les semaines à venir.
Merci beaucoup Pascal Rabl. C’est déjà la fin de la chronique, et nous n’avons pas pu aborder tous les sujets. Nous continuerons donc la semaine prochaine sur la même thématique. Bonne journée!
Merci, bonne journée à tous! Prenez soins de vous, et surtout des autres, en particulier des personnes vulnérables.
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Interview réalisée par Radio Chablais, en compagnie de:
Rabl Pascal
Directeur chez Blue Immobilier SA